L'Histoire du rhum

Le rhum avant le rhum

Dans son Histoire générale des Antilles (Paris, 1667-1671), le Père Du Tertre est le premier à évoquer une boisson qui peut s’apparenter à l’ancêtre du rhum. Quelques décennies plus tard, le Père Labat fait mention d’une boisson de consommation courante, « l’eau-de-vie de cannes ». Toutefois, la terminologie reste fluctuante : on parle aussi de « guildive » — de l’anglais « kill devil » — ou bien de « tafia ». Le mot « rum » ou rhum, qui n’est pas encore employé, proviendrait quant à lui des Antilles britanniques et de Malaisie — « brum » y désignant une liqueur spiritueuse.

Aujourd’hui, suivant la matière première utilisée, on distingue essentiellement deux types de rhums : le rhum agricole, fabriqué dans neuf distilleries sur dix et qui représente les 4/5 e de la production martiniquaise. Et le rhum de sucrerie, obtenu par la fermentation des mélasses provenant de la fabrication du sucre de canne. La Martinique en produit deux qualités : le rhum traditionnel, après une fermentation courte ; et le rhum Grand Arôme, au terme d’une fermentation longue et spécifique.

 

 

L’apparition du rhum agricole

L’essor de la production rhumière, indépendante de la sucrerie, a lieu dans la seconde moitié du XIX ème siècle. La progression des parts de marché du rhum est alors liée à la surproduction mondiale qui affecte toute l’économie sucrière. C’est à cette époque que les petits planteurs se reconvertissent dans la fabrication de rhum agricole (ou « rhum z’abitant», ou « rhum de vesou »). Parallèlement, le rhum bénéficie des différents fléaux qui s’abattent sur le vignoble français. Mais ce sont les rations distribuées aux soldats durant la Guerre de Crimée qui vont le populariser.

 

 

Le coup d’arrêt de 1902

Avant 1902, le rhum représentait près du cinquième de la valeur totale des exportations. La destruction de Saint-Pierre entraînera une baisse de 37 % de la production. Le renouveau s’amorce en 1905 : le monde rhumier a survécu et les usines se sont modernisées. En 1913, la Martinique exporte plus de douze millions d’hectolitres, compte quatre-vingt-six distilleries et seize usines.

 

 

Les guerres et le contingentement

Le rhum connaît ses années fastes pendant la première guerre mondiale : on a besoin de cet alcool pour donner du cœur au ventre aux soldats dans les tranchées… et fabriquer des explosifs. Mais au lendemain de la guerre, afin de favoriser la renaissance de ses eaux-de-vie, la métropole limite l’importation de rhum avec la loi de contingentement du 31 décembre 1922.

Pourtant, ce sont surtout les conséquences de la seconde guerre mondiale qui pèseront sur le sort des distilleries. Si le commerce avec la métropole reprend alors avec intensité, l’embellie est éphémère : les années cinquante marquent le déclin des systèmes de production hérités du XIXème siècle et le début des profondes mutations de l’économie martiniquaise.